L’AOP CÔTE-RÔTIE :
Au cours des siècles, le vignoble de la
Côte-Rôtie, situé sur le même débarcadère que celui de Condrieu, fut
l’un des lieux de passage les plus importants du Rhône. Parler des vins
de la Côte-Rôtie, c’est donc parler des bergers, des bateliers et des
chanoines. Tous ont largement contribué à la naissance et à la
réputation des vins de la Côte-Rôtie. Les bergers grecs, vers l’an 600
avt.J.-C., plutôt que de buter contre le Massif Central avec leurs
troupeaux, ont préféré les bords du Rhône et en ont profité pour planter
le sarment de syrah qu’ils avaient coupé en Dalmatie et emporté avec
eux. Beaucoup plus tard, le port de Condrieu vit le jour grâce au
courant du fleuve et à ses berges.
Du XIIIème siècle au XIXème siècle,
la corporation des bateliers du Rhône prospéra car le fleuve restait le
moyen de communication le plus utilisé. Quant aux chanoines, dès 1195,
ils firent construire un château fort à Condrieu. Une succession de
chartes du XIIème siècle au XVIIIème siècle ainsi que l’implantation de
monastères encadrant le site de Condrieu, favorisèrent les échanges et
le développement de la Côte-Rôtie jusqu’à la Révolution. Phylloxéra au
XIXème siècle, apparition du chemin de fer, Première guerre mondiale,
crise des années 1930, industrialisation de la région firent beaucoup de
mal au vignoble. Le vignoble renaît peu à peu.
En 1940, l’AOC Côte-Rôtie est créée. La particularité de la Côte-Rôtie tient dans ces vignes adossées à des pentes souvent vertigineuses. Ces terrasses permettent rarement le travail mécanique d’où un travail manuel très dur pour le vigneron. Deux zones bien distinctes délimitées par un ruisseau, le Reynard, forment le vignoble de la Côte-Rôtie. La Côte brune et la Côte blonde. On raconte que le seigneur de Maugiron aurait autrefois donné ces terres à ses deux filles, l’une brune et l’autre blonde. D’autres raisons, sans doute plus proches de la vérité, justifient la distinction entre les deux : le caractère plus viril et plus sévère de la Côte brune, des micro-climats différents, un sol brun grossier riche en oxyde de fer pour la Côte brune, un sol plus clair silico-calcaire pour la Côte blonde.
L’AOP SAINT-JOSEPH : Au sud de Condrieu, les vignes sont encore bien présentes sur la rive droite du Rhône. Mais il faudra se rendre au prochain débarcadère, à Tournon pour renouer avec la tradition de grands vins de la Vallée du Rhône. Comme à Condrieu, le gué de Tournon est indissociable du vin. Victor Hugo, dans La Légende des Siècles, est catégorique :
« Ce vin qu’aimait le grand Pompée et que Tournon récolte au flanc de son vieux mont ».
C’est ainsi que le « vin de Tournon » a bel et bien existé. Au Moyen-Âge, les seigneurs de Tournon avaient réussi à posséder aussi le débarcadère de Tain l’Hermitage. Le « vin de Tournon » regroupait donc à la fois l’hermitage produit sur la rive gauche du Rhône et le saint-joseph produit sur la rive droite. La politique mit fin à cette ambigüité, quand le Rhône servit de frontière entre le Royaume et l’Empire. À la fin du Moyen-Âge, le « vin de Tournon » se divisa en deux vignobles : l’hermitage rive gauche et rive droite le « vin de Mauves » qui devint au XVIIème siècle le saint-joseph (le nom s’explique sans doute par la présence d’un monastère sur le vignoble). Ce dernier resta longtemps un vin confidentiel, apprécié des seuls connaisseurs. La faute à qui ? À l’Histoire qui a concentré durant des siècles tous les débouchés à Condrieu (ville importante, échanges commerciaux intensifs, forte présence religieuse). Le vin de la rive droite fut ainsi privé de tout développement et de toute gloire. Le saint-joseph ne dut sa qualité qu’à quelques religieux, nobles ou bourgeois, pauvres mais passionnés.
En 1560, l’on peut lire sous la plume d’un principal du collège de Tournon : « Il ne se cueille point de vin si délicat et si friand qu’aux terroirs de Mauves et de Tournon, ni qui soit plus renommé, car il se porte à Rome et s’y vend presque autant qu’on veut ». D’abord classé en Côtes-du-Rhône en 1937, le vignoble de Saint-Joseph fut déclarée AOC en 1954. Il s’étire de Charnas à Châteaubourg sur presque 50 kilomètres, sur des collines à pente douce, comme autant de petits paysages différents.
L'AOP CORNAS : À la fin du Moyen-Âge, le « vin de Tournon » se divisa en deux vignobles : l’hermitage rive gauche et rive droite le « vin de Mauves » qui devint au XVIIème siècle le saint-joseph. Quant au vin de Cornas, si la petite histoire le classe parmi les vins préférés de Charlemagne, c’est véritablement au XVIIème siècle que sa renommée débuta réellement. Il faut noter, malgré les guerres au fil des siècles, son exploitation régulière sur les pentes abruptes et granitiques exposées plein Sud.
Au XIXème siècle, avant le phylloxéra, le cornas atteignait la même cote que le châteauneuf-du-pape.
Cornas est devenue AOC locale en 1938.
L’AOP CONDRIEU : Condrieu ou « Coin du Ruisseau », autrement dit débarcadère. Condrieu fut, au cours de l’Histoire, l’un des lieux de passage les plus importants du Rhône. Parler du vignoble de Condrieu, c’est donc parler des bergers, des bateliers et des chanoines. Tous ont largement contribué à la naissance et à la réputation du vignoble. Les bergers grecs, vers l’an 600 avt.J.-C., plutôt que de buter contre le Massif Central avec leurs troupeaux, ont préféré les bords du Rhône et en ont profité pour planter le sarment de viognier qu’ils avaient coupé en Dalmatie et emporté avec eux. Beaucoup plus tard, la ville de Condrieu put établir un port grâce au courant du fleuve et à ses berges. Du XIIIème siècle au XIXème siècle, la corporation des bateliers du Rhône prospéra grâce au fleuve qui restait le moyen de communication le plus utilisé. Quant aux chanoines, dès 1195, ils firent construire un château fort à Condrieu. Une succession de chartes du XIIème siècle au XVIIIème siècle ainsi que l’implantation de monastères encadrant le site de Condrieu, favorisèrent les échanges et le développement du vignoble jusqu’à la Révolution.
Mais le phylloxera au XIXème siècle, l’apparition du chemin de fer, la Première guerre mondiale, la crise des années 1930 et l’industrialisation de la région firent quasiment disparaître le vignoble. À la création de l’AOC en 1940, il ne restait plus que 10 hectares cultivés sur les 170 reconnus par le décret d’appellation. Grâce à la ténacité et au courage de quelques vignerons, le vignoble ne meurt pas tout-à-fait. Ils reconvertissent des terrains en vignes, défrichent des coteaux, replantent du viognier à la place des hybrides locaux, construisent des terrasses.
Ces fameuses terrasses, indispensables pour lutter contre l’érosion, permettent alors d’exploiter les meilleurs terroirs sur les meilleures expositions. Les pentes souvent vertigineuses empêchant tout travail mécanique, l’on a souvent dit qu’à Condrieu, « il fallait un homme pour un hectare ». Dans les années 1950, Condrieu, contrairement aux autres communes alentours, comptait beaucoup de familles propriétaires. À leur manière, elles participèrent aussi au renouveau du vignoble. Les gens qu’elles employaient étaient loin d’être exploités. En retour, ils travaillaient dur dans les vignes des propriétaires. Quant à ces derniers, ils se souciaient aussi du vin. Le notable Monsieur Comte, « aux vendanges, quand il y avait de la pourriture noble, faisait couper le raisin avec des ciseaux en argent et ramasser les grappes dans des assiettes. Il faisait des vins liquoreux ».
En 1967, l’aire d’appellation est étendue à d’autres communes et porte sur 387 hectares. Il faudra attendre les années 1980 pour que les efforts des décennies précédentes, associés à une nouvelle génération dynamique, paient enfin, relancent le dynamisme de l’appellation et installent définitivement la notoriété du cru. En 1986, une révision de l’aire d’AOC exclue toutes les vignes situées à plus de 300 mètres d’altitude, ramenant l’aire d’appellation à 262 hectares pour ne privilégier que les coteaux les mieux exposés. Aujourd’hui, 171 hectares sont plantés sur les 262. Le condrieu reste majoritairement un vin sec. Mais, grâce à des millésimes de plus en plus chauds depuis 1990, certains vignerons, comme Yves Cuilleron, ont tenté de reproduire le condrieu doux d’autrefois et d’en faire des cuvées spéciales.
L’AOP SAINT-PÉRAY : Après l’occupation romaine, les pouvoirs de l’Évêque-Comte de Die s’étendirent jusqu’à la ville de Valence. On lui doit notamment une université qui fonctionna jusqu’en 1790. Les prélats étaient amis du vin, tout comme les intellectuels, professeurs et étudiants. Nul doute que la qualité des vins fut encouragée par ces bons vivants. L’Évêque-Comte de Die réclama des vins puissants, à l’image de son importance. Mais nulle explication pour les vins blancs produits à l’extrémité ouest de son diocèse, à Saint-Péray. Le village a donné son nom au cru puis devint « Péray vin blanc » à la Révolution.
En 1825, Alexandre Faure, négociant à Saint-Péray, fit venir un caviste champenois et lui demanda d’élaborer un mousseux. Le premier bouchon de vin mousseux de Saint-Péray sauta en 1829, au pied du Château de Crussol, qui surplombait à pic le vignoble. Ce fut une période de gloire pour le saint-péray. On célébra le vin mousseux en France comme en Europe. Lamartine, Guy de Maupassant, la Reine Victoria, Richard Wagner, Baudelaire, le Pape Pie VII : tous en firent l’éloge. Mais le saint-péray, touché par le phylloxéra, tomba en désuétude.
En 1936, Saint-Péray et Saint-Péray mousseux figurent parmi les premières AOC françaises.